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La Minute Volume 2 Numéro 23
Des copropriétaires bousculés par AIRBNB
Votre client, un administrateur de syndicat de copropriétaires, est inquiet du phénomène AIRBNB. Il réclame une interdiction complète de location de toutes les fractions de la copropriété et possède une résolution unanime à l’effet que tous les copropriétaires sont d’accord. Comme notaire, vous devez savoir que même en présence d’une résolution dûment adoptée de l’assemblée des copropriétaires, les tribunaux peuvent invalider celle-ci.
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Copropriété : Restrictions à la location à l’ère de l’AIRBNB
Les rédacteurs de déclarations de copropriété se doivent d’être soucieux d’encadrer le droit à la location d’une fraction de copropriété, ils ne doivent pas interdire le droit à la location, mais plutôt en régir l’exercice. C’est ce qu’il faut conclure de la décision Kilzi c. Syndicat des Co-propriétaires du 10 400 Boul. L’Acadie [1] et celle de Syndicat des copropriétaires du Sir George Simpson c. Langleben [2].
Indices rédactionnels
Alors, comment peut-on conseiller nos clients qui sont inquiets des conséquences de la location de courte durée? Même si Langleben fait actuellement l’objet d’un appel, il s’y dégage des indices rédactionnels susceptibles de nous servir de guide.
On précise :
- Les restrictions de louer doivent s’étendre aux autorisations d’occuper. Toujours dans la décision de Langleben, on indique qu’aux fins de la déclaration, il faut distinguer « location » et « occupation » des fractions.
- L’obligation pour le propriétaire de remettre une copie du Règlement de l’immeuble au locataire avant la signature du bail, laquelle peut être assortie d’une clause pénale.
Compléments
Qu’il s’agisse d’une déclaration de copropriété ou d’une modification de celle-ci, diverses dispositions sont envisageables. Je vous livre mes suggestions :
1. Dans la section CONDITIONS RELATIVES À LA LOCATION DE LA FRACTION de l’Acte constitutif de copropriété, le rédacteur stipule qu’outre la location de fractions, que cela concerne également la sous-location, la cession de bail et l’autorisation d’occuper. Il spécifie que cette autorisation d’occuper peut consister aussi en un échange d’appartement ou de logement.
2. Il précise les activités interdites, comme la location d’appartements-hôtels, etc. Il spécifie ce qui est loué dans ce qui compose une fraction et ce qui est exclu.
3. Il impose aux propriétaires qui veulent louer leurs fractions diverses exigences préalables avant de signer toute entente de location. Parmi celles-ci un dépôt d’une somme d’argent à titre de garantie peut accompagner la demande d’autorisation adressée au syndicat. Laquelle est donnée par écrit si les conditions sont remplies.
4. Il requiert d’annexer à l’entente ou au bail la déclaration de copropriété accompagnée des règlements en vigueur et d’obtenir la déclaration solennelle du locataire à l’effet qu’il est au courant notamment que l’entente ou le bail est pour une durée d’au moins un an, à titre d’exemple.
5. Coordonnées complètes du locataire et preuve d’assurance responsabilité civile d’un montant déterminé sont d’autres obligations auxquelles on peut astreindre tout propriétaire qui veut louer.
6. CLAUSES PÉNALES : Essentielles, pour sanctionner le comportement de tout propriétaire de fraction ne respectant pas les exigences en lien avec une location de sa fraction.
7. DESTINATION DE L’IMMEUBLE : Il est possible également d’ajouter au chapitre de la déclaration en lien avec la destination de l’immeuble des dispositions concourant à encadrer les restrictions de location et d’occupation des fractions.
Lorsque les dispositions sont enchâssées dans l’Acte constitutif de copropriété, leurs modifications requièrent une démarche plus complexe. Cela nécessite un acte notarié en minute suivant l’article 1059 Code civil, lequel est publié au registre foncierainsi qu’une majorité plus importante, soit minimalement la double majorité de l’article 1097 Code civil et parfois même le respect de l’article 1102 Code civil.
Après ce bref survol, j’espère que cet éclairage vous aidera à guider vos clients.
Micheline Chalut, notaire
Pratique en droit de la copropriété
[1] 2001, CanLII 10061 (QC CA), 2001 CanLII 10061, EYBb2001-26512, [2001] R.J.Q. 2401 (QC CA).
[2] 2016 QCCS 3812 (déclaration d’appel, C.A. Montréal, no 500-09-026340-166, 19 septembre 2016; requête en rejet d’appel rejeté EYB 2017-275766).