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La Minute Volume 1 Numéro 7
Rencontre avec une indésirable : l'inscription non radiée...qui aurait dû l'être
Par Christine Kaesch et Annie-Claude Roch, notaires
CRID et gardes provisoires
Direction des services juridiques
Mise en contexte
Dans le cadre d’une transaction immobilière, votre examen de titres et l’étude du dossier révèlent qu’une hypothèque antérieure, bien que la créance qu’elle garantissait ait été remboursée, n’a pas été radiée. Cas classique, le notaire qui vous a précédé a mentionné qu’elle serait radiée « à même le produit des présentes », ce qui laisse supposer qu’il a perçu des honoraires sans toutefois procéder à la radiation. Ce notaire n’est plus inscrit au Tableau de l’Ordre. Pourtant, il faudra tout de même tenter de le joindre.
L’importance de contacter l’ex-notaire
Avant de préparer et de publier lui-même la quittance ou la mainlevée manquante, le notaire ayant découvert l’omission doit mentionner à son client que celui-ci a l’obligation de mettre en demeure l’ex-notaire concerné afin de lui laisser l’occasion de s’expliquer, de se défendre ou tout simplement de voir lui-même à l’exécution du travail omis.
C’est ce principe que la décision Comtois c. Gélinas [1] est venue rappeler il y a quelques années [2]. Dans cette affaire, le notaire Gélinas, instrumentant la vente d’un motel-restaurant dont se portait acquéreur Monsieur Comtois, avait omis, entre autres, de relever deux hypothèques non radiées. Au moment de la revente, le notaire Massicotte qui prépare la transaction découvre l’omission. Il en informe Comtois, qui lui donne le mandat de les radier. Ce n’est toutefois qu’après les corrections effectuées que Gélinas est mis en demeure de rembourser Comtois. Dans sa décision, le tribunal rappelle que la règle de la transmission d’une mise en demeure est clairement établie et que Gélinas aurait dû pouvoir compter sur une chance réelle de s’exécuter. Le tribunal jugeant que la tardiveté de la mise en demeure était fatale en l’instance, Comtois s’est vu refuser le remboursement réclamé.
Rappeler à son client la nécessité de la mise en demeure augmente donc ses chances d’être dédommagé. Ce conseil va de pair, au surplus, avec les règles de déontologie applicables aux notaires en matière de courtoisie et respect entre confrères.
Il peut parfois être difficile de retrouver l’ex-notaire concerné. Le cessionnaire de son greffe pourrait s’avérer une piste de solution lorsqu’il s’agit de le retracer pour le mettre convenablement en demeure comme le dicte la jurisprudence. Sans nécessairement être tenu de corriger lui-même le problème, le cessionnaire sera peut-être en mesure de vous aider dans vos recherches. En outre, il est des cas où l’acte de cession du greffe prévoit expressément la façon dont doit procéder le cessionnaire interpellé en pareille situation.
Et si l’ex-notaire dûment mis en demeure ne s’exécute pas?
Le client qui a dû débourser une deuxième fois pour obtenir la même radiation devra présenter sa demande de remboursement au secteur du CRID et des gardes provisoires de l’Ordre. Sa demande de remboursement devra contenir un bref résumé des faits (identification de l’inscription qui aurait dû être radiée, démarches pour mettre l’ex-notaire en demeure, défaut de celui-ci de s’exécuter) et être accompagnée des pièces justificatives suivantes :
- copie de l’acte de vente ou d’hypothèque instrumenté par l’ex-notaire;
- copie de la mise en demeure;
- copie de l’acte de radiation ayant dû être refait, accompagnée d’une preuve de publication;
- copie de la note d’honoraires et frais pour procéder à la radiation, dûment acquittée.
Délai de réclamation
Le réclamant dispose d’un délai d’un an à compter de la connaissance de l’omission de l’ex-notaire pour déposer sa réclamation.
[1] 2009 QCCS 2147.
[2] Pour un commentaire plus détaillé concernant cette décision, voir FONDS D’ASSURANCE-RESPONSABILITÉ PROFESSIONNELLE DE LA CHAMBRE DES NOTAIRES DU QUÉBEC, « Correction des titres et mise en demeure », (2009) Bulletin 141.